L'URSS de Staline

les camps du Goulag

Dans le camp il fallait 20 à 30 jours pour transformer un homme bien portant en épave. Seize heures de travail par jour dans la mine du camp, sans une journée de repos, une faim permanente, des haillons pour seuls vêtements, une température de -60° sous la tente déchirée où le prisonnier dormait, se chargeraient de cette dégradation que précipitaient les coups donnés par les contremaîtres et les garderies. La mine d'or envoyait régulièrement ses déchets dans les hôpitaux et dans les " cimetières fraternels " (fosses communes).
V. Chalamov, Récits de Kolyma.
Le camp embrasse un territoire énorme dans le nord-est de la Russie, grand comme la moitié de la France. La population de ce territoire est très faible: pas plus de 150 000 âmes, des détenus en majorité. On y entreprend de grands travaux, on y cherche du charbon, de l'or, du pétrole, on y exploite des mines ; on y perce des routes, on y déboise.
Après ce que j'ai pu voir en Sibérie, je considère que le nombre de 5 millions de condamnés est beaucoup trop faible et que celui de 10 millions se rapproche davantage de la réalité. ( ... )
La durée de vie des exilés du grand Nord ne dépassait pas une ou deux années. Mais si les exilés mouraient, ce qu'ils avaient bâti restait debout.)
Plus Staline faisait de " socialisme", plus il y avait de prisons en URSS.
Anton Ciliga, Au pays du mensonge déconcertant,
Dans la seconde moitié des années 30, la population du goulag doubla, passant de 965 000 détenus au début de 1935 à 1930 000 au début de 1941. Au cours de la seule année 1937, elle s'accrut de 700 000 personnes. [ ... ]
Le nouveau commissaire du peuple à l'intérieur, Lavrenti Beria, prit des mesures énergiques pour "rationaliser " le travail des détenus. Dans une note du 10 avril 1939, adressée au Bureau politique, Beria exposa son " programme de réorganisation du Goulag ". [ ... ] La norme d'alimentation des détenus, qui était de 1400 calories par jour, avait été calculée pour des gens assis en prison ". [ ... ] 250 000 détenus étaient [ainsi] inaptes au travail au 1er mars 1939 et 8 % de l'ensemble des détenus étaient morts au cours de la seule année 1938. Pour espérer pouvoir réaliser le plan de production dévolu au NKVD, Beria proposait une augmentation des rations alimentaires, la suppression de toutes les libérations anticipées, la punition exemplaire de tous les tire-au-flanc [ ... ] et enfin l'allongement du temps de travail qui serait porté à onze heures par jour, avec trois jours de repos par mois, afin d'" exploiter rationnellement et au maximum toutes les capacités physiques des détenus ".

N. Werth, Le livre noir du communisme