L'URSS
de Staline

Pourquoi
sont-ils si enthousiastes ?
Pourquoi
sont-ils si enthousiastes ? me demandai-je. Ils sont pauvrement
vêtus. Ils ne sont même pas bien nourris. Tous ont l'air
affamés... Se croient-ils vraiment les maîtres de ce
pays? S'imaginent-ils vraiment que quelque chose les attend, tout
près qui vaille la peine? Je songe à la méthode
communiste: s'emparer des enfants dès la crèche, les
suivre dans les jardins d'enfants puis à l'école,
les enrôler ensuite dans les Pionniers et les jeunes komsomols
Toujours les tenir en main par une propagande incessante! La propagande!
La propagande ! Du matin au soir. Par la TSF, le film, l'image,
l'affiche, le manuel, elle les poursuit partout.
Walter
Citrine (Syndicaliste Anglais), À la recherche
de la vérité en Russie, 1937. |
Dans
notre pays, les principaux héros des oeuvres littéraires,
ce sont les bâtisseurs actifs de la vie nouvelle : ouvriers
et ouvrières, kolkhoziens, kolkhoziennes, membres du Parti,
ingénieurs, jeunes communistes, pionniers. La force de notre
littérature soviétique, c'est qu'elle sert la cause
nouvelle: la construction du socialisme.
A. Jdanov,
Discours au premier Congrès des écrivains soviétiques,
1934. |

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Pour
la période de Pâques, chaque cercle sera dirigé
par un communiste choisi parmi les plus mûrs, préparé
d'avance pour un tel travail. Il est préférable
d'organiser ces conférences en matinée. Chaque cercle
préparera des spectacles sur des thèmes agricoles
et religieux : procès du paysan qui refuse de participer
à la coopérative, procès de Dieu...
Nicolas
Werth, Etre communiste en U.R.S.S. sous Staline,
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À
la fin de la conférence, adoption d'une motion de fidélité
au camarade Staline. Bien entendu, tous se lèvent. Des "applaudissements
frénétiques se transformant en ovation", éclatent
dans la petite salle. Pendant trois, quatre, cinq minutes, ils persistent
dans leur frénésie et continuent à se transformer
en ovation. Mais déjà, les mains commencent à
faire mal. Mais déjà, les bras s'engourdissent à
force d'être levés. Mais déjà les hommes
d'un certain âge s'essoufflent... Cependant, qui osera s'arrêter?
Car dans cette salle, parmi ceux qui sont debout et qui applaudissent,
il y a des membres du NKVD et ils surveillent qui cessera le premier!
... Et, dans cette petite salle perdue, les applaudissements se
prolongent pendant six minutes, sept minutes, huit minutes... À
la onzième minute, le directeur de la fabrique de papier
prend un air effaré et s'assied à sa place. Ô
miracle, où est passé l'indescriptible et irrésistible
enthousiasme général ? Tous s'arrêtent comme
un seul homme... La nuit même, le directeur de la fabrique
est arrêté. On n'a pas de mai à lui coller dix
ans pour un autre motif. Mais après la signature du procès
verbal de l'instruction, le commissaire lui rappelle: "Et ne
soyez jamais le premier à vous arrêter d'applaudir."
Alexandre
Soljenitsyne, L'Archipel du goulag |
Procès
de Moscou

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Prisonniers
du Goulag

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